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Entretien avec Vannina Saget, DRJSCS

Les services de l’Etat s’engagent : l’exemple de la DRJSCS

 

IMG_9819-2Témoignage de Vannina Saget – Responsable du développement des ressources humaines et référente handicap à la Direction Régionale de la Jeunesse, des Sports et de la Cohésion Sociale de Corse (DRJSCS)

 

Pouvez-vous nous présenter l’opération Duoday, de votre point de vue d’employeur public et comment la DRJSCS en est venue à participer à l’opération ?

Duoday est un dispositif qui permet à une personne en situation de handicap d’intégrer un poste de travail au sein d’un service de la Fonction Publique. En contrepartie, cela offre la possibilité aux agents de se mettre en situation d’accueillir une personne handicapée et d’être sensibilisés à la question de l’intégration de ce public dans le milieu professionnel, de mieux accepter la différence.

La démarche a été initiée par une sollicitation du Handi-Pacte, dispositif avec lequel nous travaillons régulièrement, notamment en participant aux nombreuses instances d’échange organisées. J’ai tout de suite trouvé l’idée intéressante et je me suis donc tournée vers ma direction pour leur présenter le dispositif : j’ai eu un feu vert immédiat !

L’unique frein a été exprimé en ces termes : « Que va-t-on pouvoir montrer comme mission aux personnes accueillies ? Qu’est ce qui pourrait être intéressant ? ». En fait, on s’imaginait que le Duoday était plus adapté aux collectivités qui avaient des emplois type « entretien des espaces verts », en somme des tâches plutôt physiques que la personne accueillie pourrait effectuer.

C’est assez amusant de constater que nous avions des représentations sur les attentes des personnes, mais aussi sur nos propres métiers et nous pensions que l’animation de politiques publiques n’était pas le plus intéressant pour elles.

En me retournant vers mes collègues par la suite, j’ai eu la même réaction : plutôt volontaire sur le principe mais avec une interrogation sur ce qui pouvait être proposé. Alors je leur ai posé la question « mais comment imaginez-vous la personne en situation de handicap ? » … et tout de suite est arrivée la représentation du handicap moteur avec les questions associés : « Comment faire pour que la personne puisse venir ? » « Comment aménager le service ? » « Que faut-il mettre en place pour l’accueillir ? ». Le handicap sensoriel également a été évoqué : « comment va-t-on pouvoir communiquer avec la personne ? »

Finalement le Duoday a été une bonne occasion de travailler sur nos stéréotypes et idées reçues à propos du handicap.

 

Concrètement, comment vous êtes-vous préparés pour l’opération ?

Une fois que l’on a dépassé cela, nous avons réfléchi collectivement : une collègue m’a dit que sur le calendrier proposé elle avait une réunion intéressante sur ses missions liées à la jeunesse. Une autre m’a dit qu’elle pouvait présenter la vie associative, un domaine plutôt intéressant et qui concerne beaucoup de monde.

Dans notre activité, nous gérons aussi les politiques sportives, donc je suis allée voir mon collègue en charge du sport de haut niveau pour lui demander de recevoir une personne et de lui faire vivre une journée autour de ce sujet. Idem sur le pôle formation et certification, il y a des problématiques intéressantes : comment organise-t-on un jury ? Qu’attend-t-on des candidats ?

Et pour finir, nous avons proposé la découverte d’une cinquième mission, à savoir la mienne : la diversité en matière de ressources humaines, référent handicap, responsable formation, etc. Nous avions donc 5 duos potentiels !

Il faut ensuite s’inscrire en ligne sur le site du Duoday et renseigner les missions. Ça se fait très facilement, à condition de l’avoir un peu préparé en amont : intitulé du poste, contenu de la journée, date proposée (sachant que l’année dernière nous avons pu proposer des duos dans un intervalle d’une semaine avant et après la date fixée pour le Duoday, pour plus de flexibilité et de mobilisation des employeurs).

Puis le Handi-Pacte nous a mis en relation avec Cap Emploi – puisque le Duoday s’adresse aux travailleurs d’ESAT et aux demandeurs d’emploi handicapés – afin qu’ils nous proposent des travailleurs handicapés intéressés par nos offres. J’ai d’ailleurs découvert un peu mieux Cap Emploi par ce biais, notamment dans sa mission d’insertion dans l’emploi, moi qui l’avais essentiellement sollicité pour des questions de maintien. C’est un autre avantage du Duoday : permettre une meilleure connaissance de ce partenaire et renforcer le lien avec lui.

 

Et le jour J, comment le Duoday s’est-il concrétisé ?

Nous avons finalement réussi à constituer un duo autour des missions de la jeunesse et de la vie associative, la communication sur cet événement ayant été tardive au niveau national (c’était la première édition et il a sans doute fallu un temps de rodage). Sur la journée, la personne a visité 2 services et a été reçue par les 2 chargées de missions sur ces thématiques. Nous étions très enthousiastes, et avions la volonté de lui en faire découvrir le plus possible.

Il s’agissait d’un jeune homme de 20 ans qui était en formation pour passer le brevet d’animation auprès du jeune public dans les centres de loisir. Ça tombait parfaitement bien puisque la chargée de mission jeunesse l’a intégré dans une réunion de travail durant laquelle les acteurs partenaires ont échangé sur l’accompagnement des accueils collectifs de mineurs. En gros la personne qui était en train d’être formée pour intégrer une telle structure a eu la vision de l’autre côté du miroir : la vision de celui en charge de financer et de faire fonctionner l’accueil collectif de mineur.

 

Quel a été le ressenti de part et d’autre à l’issue de cette journée ?

Il a été enchanté de cette rencontre, et pour les agents cela a été grandement bénéfique : ils ont eu affaire à un jeune en situation de handicap, non pas moteur comme les premières représentations qu’ils en avaient eu, mais psychique, et ils ont passé la journée à échanger sur sa vie de jeune corse en formation, avec aussi les contraintes de l’insularité en matière de formation (par exemple il est absolument passionné de dessin, mais il ne trouve pas les formations correspondantes en Corse).

En somme, ils ont découvert quelqu’un éloigné des caricatures des personnes en situation de handicap, qui a des projets, qui rencontre des difficultés pour les voir aboutir en Corse mais pour d’autres raisons que sa situation de santé, qui cherche sa pleine autonomie, qui est performant sur les outils informatiques – un peu comme tous les jeunes d’aujourd’hui – et qui pourrait très bien travailler dans un service de l’État s’il en avait le projet. Ça a vraiment cassé les représentations.

Ce qui a été intéressant pour moi également par rapport à ce Duoday, c’est qu’au moment de la sollicitation des agents pour participer au projet, j’ai dû faire un peu le tour des services pour rencontrer tout le monde individuellement, ce qui a été l’occasion d’échanger au sujet du handicap. Je suis passée les voir avec des post-it, comme dans les sessions de sensibilisation du Handi-Pacte, en leur demandant de noter les mots qui leur venaient à l’esprit quand on évoquait le handicap. Tout le monde a joué le jeu, sans doute parce que je l’ai un peu pris à brule pourpoint. (Rires)

Comme souvent les termes « accessibilité », « souffrance », « difficulté », mais aussi « partage » et « solidarité » ont été prépondérants. C’est intéressant de constater que ce sont des mots qui ne sont pas véritablement en lien avec l’environnement professionnel. On part tout de suite sur quelque chose de plus personnel, de plus intime et on comprend alors que cela soulève la question : « si demain je reçois quelqu’un en situation de handicap, est ce que je saurai faire ? ».

 

L’opération a -t-elle entraîné des changements dans la politique handicap ?

Le Duoday a eu de nombreuses vertus et pour nous, il a constitué « une première pierre à l’édifice », mais il faut avoir conscience que ce n’est pas suffisant pour inscrire une politique handicap dans la durée.

Il faut pouvoir poursuivre avec d’autres actions, c’est pourquoi nous avons également organisé une conférence lors de la Semaine Européenne pour l’Emploi des Personnes Handicapées (SEEPH), puis nous avons accroché l’exposition photo « Sports et Handicap » réalisée par le photographe Stéphane Bravin et mise à disposition par le Handi-Pacte.

Elle a d’ailleurs été perçue comme le fil conducteur tout au long de l’année sur cette thématique. En fait, nous avons commencé par le Duoday, nous avons accroché l’exposition pendant plus d’un mois et nous avons fini par la conférence de Guy Tisserant, président du cabinet TH Conseil et auteur du livre « Handicap en entreprise, contrainte ou opportunité ? Vers un management équitable de la singularité » lors de la SEEPH.

Ça fait quand même 3 temps forts dans l’année sur le sujet du handicap ! Et nous avons assorti le tout d’une communication par mail pour expliquer l’engagement de la DRJSCS sur le sujet aux agents.

 

Et pour cette année ?

On y retourne ! Mieux préparés, et en espérant recevoir plus de candidats !

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