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Entretien avec la Communauté d’Agglomération du Pays Ajaccien (CAPA)

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La cellule intendance de la CAPA : un dispositif innovant pour le maintien dans l’emploi des agents en situation d’inaptitude physique

Mme Battesti – Directrice des Ressources Humaines
Mme Brigato – Chef de Service Prévention et Sécurité et Référente Handicap
Mme Torracinta – Chargée de Mission Accompagnement de Projets et Développement des Compétences

Q Pouvez-vous présenter la Communauté d’Agglomération du Pays Ajaccien et ses principales missions ?

Ludivine Battesti : La CAPA est un établissement public de coopération intercommunale qui emploie 259 agents titulaires et contractuels sur des emplois permanents, plus certains emplois saisonniers qui permettent de remplacer des agents temporairement absents ou viennent renforcer les services lorsqu’ils connaissent une augmentation d’activité. La structure regroupe dix communes et représente plus de 80 000 habitants.

La CAPA regroupe dix communes et représente plus de 80 000 habitants

Nous sommes compétents sur différents domaines tel que le développement économique, le développement social, l’aménagement du territoire, les transports, l’assainissement et l’environnement. Cette dernière direction est d’ailleurs celle employant le plus d’agents techniques et générant le plus d’inaptitudes chez les agents, du fait de la pénibilité inhérente au métier d’agent de collecte ou de conducteur.

Q En quoi l’intégration des personnes handicapées est un enjeu pour la CAPA ?

Nous enregistrons actuellement un taux d’emploi de personnes handicapées de 10%, notamment parce que nous nous inscrivons dans une politique de maintien dans l’emploi proactive

Ludivine Battesti : En tant qu’employeur public responsable, la CAPA porte une attention particulière à l’intégration et au maintien des agents rencontrant des problématiques de santé. Nous enregistrons actuellement un taux d’emploi de personnes handicapées de 10%, notamment parce que nous nous inscrivons dans une politique de maintien dans l’emploi proactive. En effet, comme évoqué précédemment, la pénibilité de certains de nos métiers nous conduit naturellement à travailler sur cet axe. Nous avons d’ailleurs nommé une référente handicap, Madame Karine Brigato, qui participe au suivi et à l’animation de cette politique.

Pour autant, nous recrutons également des agents en situation de handicap (deux en 2015), même si nous n’avons pas formalisé d’objectifs dans ce domaine.

Q Peut-on revenir plus en détail sur une mesure innovante : la création d’une « Cellule Intendance » ?

Ludivine Battesti : La Cellule intendance est destinée à maintenir dans l’emploi des agents reconnus inaptes par la médecine de prévention – ou aptes mais avec de telles restrictions que la tenue de leur poste s’avère compliquée. C’est un dispositif qui a été validé par le Comité Technique en août 2013 et qui comprend trois grandes étapes :

  1. Un bilan professionnel
  2. L’affectation temporaire dans un service le temps de rechercher une solution durable
  3. Le retour au poste d’origine ou l’intégration sur un nouveau poste

L’élément déclencheur est le retour du médecin de prévention suite à un accident de service, à un signalement d’un supérieur hiérarchique, ou à une visite périodique. Nous recevons alors l’agent à la DRH avec Mme Torracinta, qui est en charge de la gestion des dossiers de santé des agents et du développement des compétences. Elle dispose donc d’une double vision : l’état de santé des agents et leurs compétences, ce qui est un plus pour faire des préconisations lors de la recherche de réaffectation. C’est elle qui fera passer les bilans professionnels par la suite.

Nous expliquons à l’agent la procédure : en quoi consiste le bilan professionnel, ce qu’est la cellule intendance, et le fait qu’il sera amené à effectuer des missions dans une autre direction, ce qui induit souvent des changements d’horaires, des changements d’activité et donc l’adaptation à une nouvelle organisation. Cela nous permet de valider la démarche avec lui, de susciter son adhésion et de placer l’agent en tant qu’acteur principal au centre d’un dispositif conçu pour son maintien dans l’emploi.

L’étape suivante sera donc le bilan professionnel.

Mme Torracinta : Je reçois les agents pour bien comprendre leur parcours, évaluer les perspectives. Le point central est la mise en confiance, car les agents ressentent souvent une certaine inquiétude quant à leur avenir. Plus que de la simple gestion administrative, il s’agit d’écoute et d’accompagnement car l’agent peut être amené à se dévoiler, à livrer des éléments sur sa vie. Il ne s’agit pas uniquement du contexte professionnel car de nombreuses compétences s’acquièrent en dehors du monde du travail. Ces aptitudes, vont être une matière à travailler lors des entretiens, dans le but de faire prendre conscience aux personnes accompagnées que la vie ne s’arrête pas au strict exercice de leur métier, que leurs ressources sont plus importantes. Au fil des entretiens, on assiste souvent à une revalorisation de la personne, à une prise de confiance et à un élargissement des représentations du monde professionnel.

À l’issue de ce bilan, une synthèse est rédigée, signée et transmise à la DRH.

Q Combien de temps prend cet accompagnement ?

Mme Torracinta : C’est bien entendu variable selon les personnes. En général le rythme est fixé à un entretien hebdomadaire, ce qui permet une appropriation et une maturation entre chaque séance. Le nombre d’entretiens varie en général de 2 et 8, soit au maximum 1 mois. Selon les agents et les situations individuelles, parfois le bilan peut être de courte durée.

Le nombre d’entretiens varie en général de 2 et 8, soit au maximum 1 mois

Ludivine Battesti : Pour déterminer les opportunités de placement, je recense régulièrement les besoins au sein de la CAPA. Maintenant, le dispositif est connu et les directeurs me sollicitent parfois directement lorsqu’ils connaissent une augmentation d’activité (par exemple pendant l’été), pour des remplacements de congés ou lorsqu’ils ont des missions particulières, afin de savoir si une personne ayant intégré la cellule intendance peut correspondre à leur besoin. Par exemple, nous travaillons beaucoup avec la direction des transports, la direction des bâtiments et du matériel ou encore la direction de l’environnement. On peut dire que c’est un procédé qui a des avantages pour chacune des parties, à la fois pour l’agent qui reste en contact avec son environnement professionnel (le travail est un des principaux facteurs d’intégration sociale), pour le service d’accueil et pour la collectivité qui maintient ses agents en activité.

Lorsqu’un poste est identifié, un entretien entre le directeur susceptible d’accueillir l’agent et l’agent lui-même est organisé. Le Directeur Général des Services suit également chaque dossier et valide le choix retenu. Ainsi, l’ensemble des acteurs, aux différents niveaux de l’organisation, sont concertés, ce qui garantit au maximum le succès de la démarche.

Enfin, la dernière étape consiste en une ultime validation du médecin de prévention pour s’assurer de l’adéquation entre les prérequis du poste et les capacités physiques de l’agent. Pour cela, la direction d’accueil établit une fiche de poste détaillant les taches que l’agent devra effectuer.

Le parcours est alors entériné par un arrêté signé par le président de la CAPA qui permet l’affectation de l’agent pour un temps déterminé à une nouvelle direction dans le cadre de la cellule intendance.

Q Y-a-t-il un suivi particulier des agents bénéficiant du dispositif ?

Mme Torracinta : Il y a bien entendu un suivi de l’agent durant tout le temps de son affectation au sein de la cellule intendance. La taille de la collectivité permet de rencontrer fréquemment les personnes, parfois ce sont elles-mêmes qui viennent nous saluer pour parler de leur expérience et faire le point. Nous établissons également un contact régulier avec le chef de service ou le directeur pour s’assurer du bon déroulement de la mission.

Ludivine Battesti : Nous faisons aussi un point hebdomadaire en réunion de service sur la situation des agents de la cellule intendance, ce qui nous permet également d’adapter leur parcours si besoin est. Cela n’arrive pas souvent, mais nous avons par exemple eut le cas récemment d’un agent dont l’intégration dans son service d’accueil n’avait pas très bien fonctionnée, et que nous avons affecté dans une autre direction.

Enfin, l’agent fait l’objet d’un suivi renforcé de la part de la médecine du travail, surtout lorsque son état de santé n’est pas stabilisé. Nous travaillons en étroite collaboration avec le Service Interentreprises de Santé au Travail de Corse du Sud (SIST 2A).

Q Combien de parcours la cellule intendance a-t-elle géré ?

Ludivine Battesti : Ce dispositif est né en 2013 et a accueilli quinze personnes jusqu’aujourd’hui, soit 5 par an en moyenne. Les missions sont à durée variable et certains agents sont sortis du dispositif pendant que d’autres y sont encore. Par la suite, les agents peuvent retourner à leurs missions d’origine lorsque les inaptitudes formulées par le médecin de prévention étaient temporaires. Certains agents ont même évolué après avoir postulé en interne suite à des ouvertures de poste.

Ce dispositif doit rester temporaire et avoir pour objectif de favoriser l’accès à un nouveau poste de manière durable, tout en maintenant l’agent en activité durant la recherche de solution.

Q Pour terminer, avez-vous un exemple de maintien dans l’emploi particulièrement réussi via la cellule intendance ?

Mme Torracinta : Nous avons l’exemple d’un agent d’exploitation polyvalent, ou « ripper », qui s’est vu notifier une inaptitude à son poste de travail suite à une dégradation de son état de santé. Cette personne était extrêmement volontaire : à sa demande, elle a été reçue sur un rythme de deux fois par semaine lors de la phase de bilan professionnel. Elle a ensuite été affectée à la direction des transports, où elle s’est très bien intégrée et a donné entière satisfaction.

Aujourd’hui, l’agent a réintégré sa direction d’origine -la direction environnement- où il a reçu de nouvelles missions qui se sont étoffées au fur et à mesure. C’est maintenant le directeur qui nous sollicite pour maintenir cet agent à son nouveau poste. Nous sommes donc en train de préparer sa reconversion.

Nous sollicitons également les aides du FIPHFP* afin d’aménager les postes d’agents connaissant des difficultés de santé ou pour améliorer leurs conditions de vie

Dans certains cas, le passage par la cellule intendance peut même être un facteur d’évolution professionnelle. À tout le moins, il est presque toujours un facteur de développement des compétences.

Q Quelles sont les autres actions menées autour du maintien dans l’emploi ?

Karine Brigato : Nous sollicitons également les aides du FIPHFP* afin d’aménager les postes d’agents connaissant des difficultés de santé ou pour améliorer leurs conditions de vie. Par exemple, nous avons monté plusieurs dossiers pour le financement de prothèses auditives. Au fur et à mesure, les agents en parlent entre eux et certains nous sollicitent directement pour les aider à monter un dossier de RQTH (Reconnaissance de la Qualité de Travailleur Handicapé) afin de bénéficier de ces mesures de compensation du handicap.

Q Un mot ou un conseil pour les employeurs publics ?

Nous avons donc saisi la demande d’aide sur la plateforme des aides du FIPHFP pour être remboursés quasi-intégralement par la suite

Actuellement, nous travaillons sur le cas plus complexe d’un agent ayant été touché par une maladie professionnelle. Nous avons constaté que cet agent avait besoin d’aménagements sur son poste de travail et d’une reprise à temps partiel pour garantir son retour dans les meilleures conditions.

Nous avons donc fait appel au Sameth** qui a mobilisé un ergothérapeute. Ils sont venus étudier le poste in situ, ont reçu l’agent plusieurs fois puis ont formulé des préconisations qui ont été validées par la médecine de prévention. L’aménagement comprenait : une chaise ergonomique, un rehausseur d’écran, des reposes bras, un pavé numérique et un repose poignet. Nous avons donc saisi la demande d’aide sur la plateforme des aides du FIPHFP pour être remboursés quasi-intégralement par la suite (le FIPHFP a pris en charge 1200 € sur les 1300 € de dépenses engagées).

Propos recueillis par François Le Saux-Mari

*Fonds pour l’Insertion des Personnes Handicapés dans la Fonction Publique
**Service d’Aide au Maintien dans l’Emploi des Travailleurs Handicapées

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